Le documentaire « Adoption : les dessous d’un trafic » sorti le 12 septembre 2004 du journaliste d’investigation français Hubert Dubois met en lumière la corruption et les fortes pressions exercées par des lobbies pour rouvrir les adoptions internationales en Roumanie.
Entre 1990 et 2001, la Roumanie a largement eu recours à l’adoption internationale, voyant des milliers d’enfants partir à l’étranger dans des conditions souvent précipitées, marquées par des abus et des trafics. En juin 2001, le Comité Roumain pour les Adoptions (CRA) a suspendu l’enregistrement des nouvelles demandes d’adoption internationale de familles étrangères pour une durée minimale d’un an.
La Roumanie prend alors la décision de mettre un terme aux adoptions internationales en lançant des programmes axés sur la protection de l’enfance. Le pays dénonce un système qui a permis à l’adoption internationale de devenir un marché lucratif de l’enfance, justifiant ainsi le moratoire de 2001. C’est le point de départ d’une réforme législative visant à protéger les enfants en difficulté. La nouvelle loi prévoyait de stopper les adoptions internationales en gelant les dossiers en cours, concernant notamment des familles de France, des États-Unis, d’Italie et d’Israël. Le message de l’État roumain était sans équivoque : « aucune nouvelle demande ne serait acceptée« . Parallèlement, le gouvernement a développé des solutions pour garantir la protection de ses enfants.
Extrait « Adoption : les dessous d’un trafic » – film de Hubert Dubois – Galaxie Production/OFRT 2004
Les institutions ont été transformées en lieux de vie et, grâce à une volonté politique affirmée, les enfants quittant les centres de placement ont été placés dans des familles d’accueil, certaines d’entre elles exprimant leur souhait d’adopter ces enfants. L’objectif était de remplacer l’adoption internationale par l’adoption nationale.
En mars 2004, Gabriela Coman Secrétaire d’état de la protection de l’enfance a présenté son projet de loi devant le Sénat, alors que la Roumanie, candidate à l’Union Européenne, cherchait à se conformer aux normes européennes. Des délégations de parlementaires étrangers se sont succédées à Bucarest pour faire pression sur leurs homologues roumains, certains sénateurs restant indécis.
Les pressions allaient jusqu’à inclure des enjeux politiques, comme l’adhésion de la Roumanie à l’OTAN, officialisée en avril 2004. Le Congrès américain, par exemple, avait exigé la levée du moratoire comme condition préalable aux négociations. Finalement, une cinquantaine d’enfants ont pu partir à l’étranger.
Madame Nicholson, députée au Parlement européen, est apparue comme la principale alliée de Gabriela Coman sur la scène internationale, face à un marché influencé par des intérêts financiers et politiques. L’ambassade des États-Unis à Bucarest, ainsi que les familles adoptives venues présenter leurs enfants roumains adoptés, ont poursuivi leur lobbying.
La semaine décisive est arrivée : la loi a été présentée et acceptée par le Parlement roumain en mai 2004, interdisant l’adoption d’enfants roumains par des familles non roumaines. Néanmoins, les lobbies avaient pour objectif de modifier cette loi après les élections présidentielles.
Lien du documentaire entier :
Ce documentaire aborde également les enjeux complexes de l’adoption internationale, en mettant particulièrement l’accent sur les pratiques douteuses observées au Pérou, Guatemala et à Madagascar.